Décision Synodale 2021

Synode, Vote

Les Eglises luthériennes et réformées françaises n’avaient pas souhaité donner suite au processus conciliaire « Justice, Paix et Sauvegarde de la Création » lancé par le COE à Vancouver en 1983 et clôturé avec la Convocation de Séoul en 1990. Cependant, un groupe constitué de quelques théologiens, scientifiques et militants écologistes, en réponse notamment à l’appel de la Rencontre Œcuménique Européenne de Sibiu en 2007, crée en 2009 le réseau « Bible et Création » (aujourd’hui Espérer pour le vivant), pour interroger théologiquement notre rapport à la situation écologique. Les membres de ce réseau interpellent régulièrement les Synodes régionaux et, à l’approche de la COP 21 à Paris, ils contribuent activement au colloque « Terre créé, terre abîmée, terre promise » porté en 2014 par la Fédération Protestante de France. Finalement, le Synode national de Nancy demande en mai 2016 au Conseil national de mettre à l’ordre du jour d’un prochain Synode la question de l’écologie « comme opportunité spirituelle et théologique de penser et débattre de notre rapport au monde, à la nature et à l’espérance d’un monde meilleur ». Ce processus sera engagé en 2019, deux ans après la création du label œcuménique « Eglise verte », également porté par Bible et Création, et aboutira à la décision du Synode national de Paris-Sète 2021, après un délai dû à la pandémie de la CoVid 19.

Le Synode national 2021 de Paris-Sète

 

Ce Synode national a adopté une décision intitulée « Ecologie : quelles(s) conversion(s) ? » dont un extrait, correspondant à la position théologique de l’Eglise, est proposé ci-après.

  • Cette « Position théologique » présente la création « comme une promesse…un cadeau qui nous précède », mais en constant devenir, en partenariat avec l’humain. Il incombe aux Églises de faire entendre le « cri de la création » qui souffre dans les douleurs de l’enfantement (Rm 8). Face aux dérives de toutes sortes, économiques, écologiques et sociétale, l’EPUdF exhorte à une « relation de service et de respect » et à une « responsabilité de gouvernance…dans l’espérance de la venue d’un monde plus juste et équilibré ».

 

Les autres parties du texte sont consacrées

  • d’une part à la position éthique de l’EPUdF face à l’urgence écologique :
    • 1) une « puissance retenue », en ne succombant pas au désir de toute puissance, notamment technologique 2) une « sagesse » par un équilibre harmonieux entre les contraintes et défis, écologiques, économiques et sociaux, notamment une justice sociale et écologique.

 

  • d’autre part aux paroles publiques et ecclésiales qu’elle adresse au monde et à ses propres instances :
    • l’EPUdF appelle à un « changement radical » (synonyme de conversion) de ses membres, communautés, et de la société dans son ensemble, avec quelques recommandations et actions concrètes : sobriété, changement de modèle économique, justice climatique et sociale, initiatives citoyennes ; confiance et espérance. Aux paroisses et églises locales, on recommande un travail biblique et théologique et une cohérence pratique, par exemple par adhésion au programme « Église verte ». Le Synode invite enfin le Conseil national à mettre en œuvre ces recommandations.

 

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Ecologie : quelle(s) conversion(s) ? - Position théologique

Réunie en Synode national, l’Église protestante unie de France, en tant qu’institution au service de la bonne nouvelle de Jésus-Christ, se dit profondément bouleversée par la crise écologique et sanitaire que subissent tous les êtres vivants de cette terre. Elle est interpellée dans sa manière de proclamer le Dieu créateur et libérateur, et dans sa manière de vivre au quotidien sa mission. En écho aux réflexions menées depuis des années par le Conseil Œcuménique des Églises, en résonance avec les autres traditions religieuses et ecclésiales de notre pays et dans le monde, l’Église protestante unie de France, nourrie par sa lecture des Écritures, exprime ses convictions :

 

  • sur la relation de Dieu à la création : la création, une promesse
  • sur l’autonomie et la légitimité du monde naturel : le cri de la création
  • sur les relations de l’humain au monde naturel et sauvage : le service de la création.

 

La création, une promesse

 

Les théologies contemporaines de la création attirent notre attention sur deux points particulièrement importants pour une réflexion ecclésiale. D’une part, elles invitent à comprendre la création positivement comme venant de Dieu sans que l’humain puisse en connaître l’origine, ni savoir ce qui le détermine pour sa continuité. Ainsi la création est un cadeau qui nous précède. Cette extériorité du monde à l’humain est ce qui empêche ce dernier de pouvoir tout maîtriser, de tout contrôler. Mais cette positivité du monde demeure néanmoins porteuse d’un advenir qui passe par l’humain et qui se joue toujours devant Dieu.

 

D’autre part, elles soulignent que la nature a un statut de sujet dans le regard croyant, et que la création est moins un événement fondateur qu’un événement qui se produit encore aujourd’hui. Dieu fait surgir à chaque instant du nouveau, il est le Dieu « avec nous » (Emmanuel) qui rejoint le monde et les humains, œuvre à une nouvelle création et appelle à une manière différente d’habiter le monde. Par sa Parole, Dieu ne cesse de travailler à la transformation du monde avec tous les êtres qu’il a créés. Lire le récit de Genèse 1 telle une promesse, plus qu’un regard rétrospectif sur les origines met en valeur cette idée d’une création toujours en élaboration.

 

Une telle compréhension de Dieu toujours en attente à l’endroit du monde et de ses créatures, donne sens, porte à l’espérance et à la louange. Cette création est fondamentalement bonne, elle est le sujet de notre émerveillement et de notre reconnaissance.

 

Le cri de la création

 

S’appuyant sur sa foi au Dieu créateur et en Jésus-Christ, sur sa compréhension de la place de l’humain, et sur l’héritage prophétique qui anime sa tradition, l’Église protestante unie de France estime qu’il est de sa responsabilité théologique de faire entendre le cri de la création (Romains 8, 18-30) au regard de la situation écologique actuelle. Elle se repent pour ses manquements vis-à-vis du projet créateur de Dieu, et vis-à-vis de la relation de service et de respect due à la création, une relation trop souvent interprétée comme une domination sans limite. Elle reconnaît les complicités et les passivités des Églises face à la dégradation des environnements naturels et sociaux sur la terre. Elle témoigne également du pardon de Dieu, qui nous libère de la culpabilité, de la peur de l’avenir, de l’angoisse de la fin d’un monde et nous permet l’espérance. Elle reçoit un appel à une conversion personnelle, ecclésiale et sociétale au service de la création.

 

C’est pourquoi elle interpelle les femmes et les hommes en responsabilité politique, intellectuelle et religieuse sur la lenteur, l’insuffisance voire les contradictions délibérées des discours et des actions mises en œuvre face à l’urgence du dérèglement climatique et du recul grandissant de la biodiversité de la planète. Elle s’indigne des dérives économiques et des choix égoïstes des pays riches qui ont conduit à une situation écologique alarmante et des situations de misères insupportables. En interpellant solennellement avec d’autres les autorités publiques, les acteurs économiques, mais aussi l’ensemble des membres de l’Église, l’Église protestante unie de France veut prendre sa part de responsabilité, car elle se bat avec l’espérance en la capacité humaine à construire un avenir plus résilient en ce monde, pour tous les humains et la création.

 

Le service de la création

 

La tradition biblique et théologique conduit l’Église protestante unie de France à comprendre que l’humain est foncièrement créé dans une relation de service et de respect à l’endroit de la création, dont il fait partie puisque l’humain advient dans le même jaillissement créateur de la part de Dieu. Il s’agit de reconnaître une autonomie et une légitimité au monde naturel et sauvage (Dieu lui-même le juge « bon »), et en même temps de se reconnaître dans une dépendance sans confusion avec ce monde. La notion « d’image de Dieu » confère à l’humain une position singulière qui le place dans une interrelation triangulaire entre Dieu, lui et le monde naturel et sauvage. Dans le rapport à ce dernier, l’humain a une double responsabilité : à l’égard de Dieu dans la participation à l’accomplissement créatif du monde (Genèse 1 et 2), et à l’égard du monde naturel et sauvage, une responsabilité de gouvernance et de soin pour la continuité de la vie sous tous ses aspects, à la manière du Christ qui appelle à être « serviteurs de tous » (Marc 9,35). Sous ce double aspect, la responsabilité humaine est de manifester l’engagement incessant de Dieu au monde et l’espérance de la venue d’un monde plus juste et équilibré.

 

 

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Un entretien avec le pasteur Robin Sautter, rapporteur du sujet synodal (vidéo)

 

La table ronde du Synode sur l’écologie (vidéo)

 

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